

Mohamed Messadaoui, le sens du contact
Directeur de centres éducatifs dans sa vie professionnelle, responsable de la commission nationale d’arbitrage de karaté contact, full contact et interdisciplines dans sa vie associative, Mohamed Messadaoui, septième dan, a mis le karaté et son langage au cœur d’une vie. Une vie de « contact », bien sûr.
Un désir de contact
« Dans mon petit village du Var, il y avait un club de judo. Mais moi, je ne voulais pas en faire, mon frère y excellait déjà, et je ne rêvais que de coups de pieds et de coups de poing. Je cherchais partout les magazines de karaté, pour Bruce Lee, pour les pages contact, les reportages sur Dominique Valéra. J’ai fini par trouver le Tonic Club 83, qui venait d’être fondé quelques années plus tôt. Il y avait une section karaté, une section boxe américaine, une grande salle de musculation, c’était nouveau. Quarante ans après, je suis toujours licencié dans ce club. J’ai eu la chance de tomber sur Paul Bottin, un puits de pédagogie. C’était du shotokan, mais plus engagé dans la pratique du combat que ce que je découvrais dans les compétitions que je faisais. Dès mon premier dan, je me suis mis en parallèle au full contact, et j’ai mené les deux de front pendant quasiment trente ans. »

Paul, le mentor
« Paul Bottin a toujours su m’écouter et me conseiller, tel un mentor, comme il a dû l’être pour une partie des nombreuses ceintures noires et les champions régionaux et nationaux qu’il a formés. C’est un homme qui réussissait à inculquer des valeurs éducatives à tous. Il y avait une dimension sociale très forte qui m’a marqué. On avait des gens du voyage qui venaient s’entraîner, des familles issues de l’immigration comme la nôtre, et souvent il ne demandait qu’une cotisation symbolique. Dès que j’ai eu ma ceinture noire, il m’a considéré comme un invité du club. Un de mes premiers souvenirs : une longue conversation entre mon père et lui. Mon père qui devait lui dire qu’il souhaitait que je devienne quelqu’un de bien, que je ne fasse pas de bêtise… Si je ne rentrais pas rapidement après l’entraînement, il prenait la voiture pour venir me chercher. Bien des années plus tard, Paul était là pour porter son cercueil lors de son enterrement. Ce sont des choses qui ne s’oublient pas. J’ai eu mes réussites en compétition, j’ai obtenu des titres nationaux et je suis heureux d’avoir pu rendre fier ma famille. Nous étions huit enfants et je savais, en commençant, que mon désir de karaté était un luxe. En Algérie, dans le village d’enfance de mon père, il y avait des articles sur mes résultats. J’étais célèbre là-bas, sans le savoir. C’est aussi pour cela que j’ai envie de rendre à Paul tout ce qu’il m’a donné sans calcul pendant tant d’années. Je donne des cours, mes enfants sont inscrits. Ce club, c’est vraiment un repère, un endroit qui nous fait du bien. »
Emmanuel Charlot / Agence Sen No Sen