
Paroles de prof… Franck Lavaine, le feu sacré
Grâce à une passion inaltérable et un sens aiguisé de l’initiative, Franck Lavaine, cinquante ans et directeur technique du Vietvodao Truong Bach Long à Templeuve (Nord), est devenu l’une des figures des arts martiaux vietnamiens hexagonaux.
Évoquez Franck Lavaine avec deux de ses élèves et l’image d’un enseignant chaleureux et toujours à la recherche de la meilleure idée possible pour développer sa discipline se dessine presque instantanément. Gianni Volturno, troisième dang et responsable de l’arbitrage pour la ligue des Hauts-de-France donne le ton : « Franck sait mixer avec beaucoup d’habileté le traditionalisme du cadre martial et l’humour dans son enseignement. » Delphine Brame, premier dang, secrétaire adjointe et responsable de la communication du club, confirme : « Il a toujours la petite réflexion pour vous faire sourire, lors des exercices de gainage par exemple. Une manière de tester notre concentration et notre volonté à avoir, comme il le dit, de jolis abdos pour l’été prochain (sourire). »
Olivier Dhelemme, l’initiateur
Une personnalité qui emporte l’enthousiasme, peut-être et d’abord grâce à une passion qui vient de loin, et qui n’a jamais failli. « Ma première rencontre avec les arts martiaux a lieu sur la plage d’Argelès-sur-Mer, à l’âge de quatre ans. J’essaie le judo et ça me plaît ! Arrivé à l’adolescence, vers quatorze-quinze ans, un copain, au collège, me montre à la récréation ce qu’il apprend dans son club d’arts martiaux vietnamiens. Cela m’interpelle et m’intrigue. Par chance, un club vient de s’ouvrir juste à côté de chez moi, dans la banlieue sud de Lille. »
Franck va alors découvrir Olivier Dhelemme, son premier professeur. Une rencontre particulièrement marquante. « Il était impressionnant par son discours, son regard, son attitude. Il avait une prestance, du charisme. Avec le recul, je sais que je n’ai jamais autant appris que lors mes cinq premières années, avec lui. Lors du premier cours, j’ai assisté à une démonstration d’utilisation d’armes. Cela confirmait ce que je venais y chercher : de la nouveauté, de la variété, le sens du combat. Pour l’anecdote, il restait un Pho Vuc à vendre. On a tiré à pile ou face avec mon meilleur ami, pour savoir qui l’achèterait. J’ai gagné et j’y ai vu comme un signe. Le mercredi suivant, je validais mon inscription. Pourquoi le viet vo dao et pas le judo ou le karaté ? Le côté confidentiel, novateur et donc excitant. J’ai eu l’impression de faire partie d’une aventure, d’un petit groupe de privilégiés. »
Rigueur martiale
Petit-fils et fils de policiers, père d’une fille gendarme, Franck Lavaine possède une compréhension fine de ce qu’est l’autorité grâce, notamment, à cette filiation. La plus-value de la pratique désormais quotidienne du viet vo dao va, elle, se jouer sur un autre plan. « Cela m’a permis d’acquérir une hygiène de vie permanente dont on trouve le socle dans la rigueur martiale. J’ai structuré ma vie de tous les jours à travers ce prisme. »
Plusieurs fois vice champion de France combat entre 1991 et 1996, Franck à vingt-et-un ans lorsqu’après son service militaire, il prend la suite d’Olivier Dhelemme. « Une évidence ». Professeur bénévole et président du club depuis maintenant trente ans, celui qui débuta comme magasinier chez Décathlon, avant de finir directeur d’exploitation (il a participé à l’ouverture du premier magasin du groupe en Russie) et qui depuis plusieurs années gère un organisme de formation spécialisé dans le secourisme et les incendies, évoque ce qui est son bébé depuis 1993 en ces termes : « L’ADN du club ? La compétition et un esprit de famille. La compétition parce que je suis intimement persuadé qu’elle est l’étape ultime et nécessaire pour se construire en tant que pratiquant. Tous les ans, nous avons des podiums nationaux voire internationaux comme en 2013 où Jonathan Janicki finit vice champion du monde. » La compétition mais pas que. Le cours de self-défense mis en place depuis plusieurs années croît chaque année. « Il y a beaucoup de mamans de pratiquants, explique Delphine Brame. Un succès dont on peut se réjouit, d’autant qu’il s’est créé uniquement grâce au bouche-à-oreille ! »
Cette saison, le club compte déjà cent seize licenciés dont un peu plus d’un tiers de féminines ! « Je suis sans cesse bluffé par Franck, ajoute Delphine, elle-même mère d’une pratiquante désormais âgée de dix-huit ans. Ce n’est jamais le même cours. Impossible donc de s’ennuyer ou de tomber dans une forme de routine avec lui. »
Gianni Volturno abonde : « par ses déplacements en France et à l’étranger, Franck s’imprègne beaucoup de ce qu’il voit et nous transmet, avec sa pédagogie bien à lui, ces nouvelles approches, ce qui rend son enseignement très riche. »
Cet été par exemple, Franck est parti un mois seul en Thaïlande, avant de rester un mois au Vietnam avec trois de ses élèves dans deux écoles, l’une à Hanoi (école Thang Long Vo Dạo) et l’autre à Hue (Vo Ta – Hô Quyen Dao). « Mes élèves ont ainsi pu se rendre compte par eux-mêmes du niveau exceptionnel d’exigence des pratiquants vietnamiens. »
Le challenge du Dragon Blanc
Professeur inspirant, Franck Lavaine fourmille d’idées pour faire la promotion de sa passion. « Il a juste le petit défaut d’organiser parfois certaines choses à la dernière minute » s’amuse Delphine Brame. Parmi ses trouvailles, le Challenge du Dragon Blanc qui fêtera sa huitième édition la saison prochaine. Le principe : « nous invitons tous les clubs de sports de combat que nous connaissons – judo, karaté, boxe thaïlandaise, etc., chaque discipline constitue une équipe qui doit faire une démonstration de cinq minutes, dynamique, avec des réponses propres à maîtrise technique, sur des attaques qui seront les mêmes pour chaque équipe. Chaque discipline vient également avec un expert, lesquels forment un jury qui évalue chaque prestation ». Un événement qui réunit entre trois et quatre cents spectateurs le samedi. Le dimanche, un stage dirigé par un expert complète ce rassemblement. « Nous avons eu Dominique Valéra il y a quelques années. En 2024, ce sera un moine chinois de Shaolin » annonce avec enthousiasme Franck Lavaine, professeur dont le feu sacré brûle plus que jamais.