
Mondiaux de krav-maga – Mohamed Moussaoui : « Le krav-maga, un projet global »
Expert 7e dan, ancien double champion du monde de la discipline, Mohamed Moussaoui, combattant né et homme apaisé, resitue les championnats du monde à venir dans le contexte plus global du développement du krav-maga.
Qu’attendez-vous de ces championnats du monde de krav-maga à domicile, des 26 et 27 octobre prochains ?
Il s’agira des deuxièmes organisés en France après ceux de 2019. Notre ambition, soutenue par la FFKaraté et son président Francis Didier, qui est très actif pour le krav-maga, est d’abord de réunir un maximum de combattants et de pays. Cuba, la Colombie, l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche étaient les premiers inscrits. En tout, nous attendons entre douze et quinze pays, même si, vu le contexte, les combattants israéliens ne seront sans doute pas sans présents. Tous sont des pays moteurs dans le krav-maga mondial, avec nous Français. En tout, nous attendons six-cents compétiteurs sur les deux jours et les trois formats de compétition (en savoir plus page 8), sachant que certains ne viennent que pour la technique ou le combat défense, que certains font les deux en plus du combat libre le dimanche après-midi. Quoi qu’il en soit, on va retrouver de la pluralité dans les styles et la provenance de tous ces combattants en combat libre, selon qu’ils viennent du krav-maga, du karaté-mix, du sanda, du full-contact… Je pense que ce format est séduisant pour beaucoup de monde.
Quel regard portez-vous sur ce krav-maga de compétition ?
Il répond à une envie et à une forte demande. Bien sûr, en krav-maga, il existe un public dit de « self-défense », mais ne pas s’ouvrir, tout en restant cohérent sur le plan de l’esprit et de la technique, cela aurait exclu pas mal de gens de notre fédération, des femmes comme des hommes, de tous les âges, alors que nous sommes en capacité de proposer un enseignement de qualité et une expression en compétition avec du savoir-faire et de la sécurité. Là, nous formulons une vraie proposition de pratique, à la fois ouverte et cohérente, des clubs nous rejoignent cette semaine parce que nous faisons la démonstration de notre compétence. Enseignement de self-défense et compétition peuvent donc parfaitement cohabiter. Et puis la compétition, c’est quand même toujours un passage intéressant, un révélateur quelque part.
Un petit moment de vérité…
Oui, sur soi d’abord. C’est le terrain sur lequel on vient s’éprouver. Ce n’est pas facile mais cela sert souvent de déclencheur pour la confiance en soi. Pour les clubs qui y envoient des élèves, comme pour leur participation aux stages d’ailleurs, c’est un signe d’ouverture et celui qu’ils n’ont pas peur que leurs élèves perdent.
Est-ce votre message ?
Oui, je propose des stages sur toute la France, je suis sur ou au bord des tapis tous les week-ends, pour prôner cette vision du krav-maga comme une pratique libre, y compris de la compétition. J’ai moi-même été compétiteur, je suis au contact de purs kravistes et, quand on discute, mes arguments font souvent changer les avis. Il ne s’agit pas de marteler que la compétition est indispensable parce que, dans nos clubs, il y a 80% voire 90% de pratiquants « loisirs », comme en karaté, mais on ne doit pas non plus avoir une vision manichéenne de la pratique. Je suis moi-même bien placé pour en parler.
En commençant par le karaté avant d’explorer d’autres choses…
C’est vrai, j’ai commencé par le karaté, dans mon petit village de Maubourguet, dans les Hautes-Pyrénées, en shotokan parce qu’il n’y avait que ça (il est désormais 6e dan, NDLR), aux côtés d’un professeur passionné, Maxime Vanacci. La salle était à sept kilomètres de chez moi, j’y allais en courant, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, tellement on était motivé à l’époque. Puis, j’ai fait d’autres sports à côté bien sûr pour compléter : de la boxe française, de la boxe anglaise, du sambo où j’ai été en équipe de France, remportant notamment les championnats du monde, mais je suis toujours resté licencié à la fédération de karaté. Expert de sambo, je suis parti vers le krav-maga en 2014 où j’ai commencé mes premières compétitions.
Avec un joli palmarès, il faut le souligner…
J’ai gagné plusieurs fois les championnats de France, les championnats d’Europe et deux fois les championnats du monde, en 2017 et 2019. Je possède en outre les deux titres : technique et combat. Ce que j’y ai trouvé, c’est un patrimoine technique, j’ai croisé le chemin d’Alain (Formaggio) et toute l’équipe à l’époque. Ce sont eux qui m’ont poussé à faire les championnats du monde. Désormais, je ne donne plus de cours de karaté, c’est mon élève Stéphane Binde qui s’en charge, mais, dans mon club, tout le monde cohabite : karaté traditionnel, karaté contact, full-contact, krav-maga…
Au-delà de ces championnats du monde, il faut rappeler que c’est l’ensemble du krav-maga français qui se structure…
Oui, ce krav-maga pluriel crée de l’émulation. Nous sommes à ce jour quelque vingt-mille licenciés et notre volonté est d’aller, au travers des stages que nous organisons depuis plusieurs saisons maintenant, au plus près des clubs. C’est dans cette optique que nous décentralisons les stages d’experts, à Lille, Nice… Tous les ans nous changeons de région. Dans le même ordre d’idée, nous avons mis en place cette année pour les enfants deux zones, Nord et Sud, pour les coupes de France. Le championnat de France, lui, viendra ensuite. Dans notre projet global, il s’agira aussi de proposer des formations spécifiques pour les professeurs car nous savons que la demande est forte.
Cet entretien est à issu du numéro d’Officiel Karaté Magazine n°16 à retrouver ici dans intégralité