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Dans nos territoires – Ép. 4 : Mitsudomoe Wado-Ryu Karatedo

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Depuis quelques mois, la presqu’île de Crozon, terre de pêcheurs aux allures de bout du monde, a adopté le karaté. L’œuvre d’un ingénieur aquitain de passage en Bretagne pour une poignée d’années.

« Dernier supermarché avant l’Amérique. » Quelques kilomètres plus au sud, un panneau planté en bord de route a le mérite d’avertir les passants. Le Mitsudomoe Wado-Ryu Karatedo, lui, n’a pas (encore) pris cette liberté, mais la démarche serait légitime. À l’ouest de cette langue de terre et de rochers, seule la mer d’Iroise s’offre à l’horizon. Il faut compter trois-mille kilomètres de grand bleu avant les premières terres, plus de cinq-mille si l’on souhaite revêtir le karategi à Manhattan… Du mieux, à l’est, mais pas la panacée : une demi-heure dans les ribines bretonnes permet de rallier Châteaulin et son Goju Ryu Karaté Do. « À l’arrivée, un constat implacable : ne m’imaginant ni découvrir un nouveau style après quinze ans de wado-ryu, ni mettre ma pratique entre parenthèses pour plusieurs années, je devais créer ma structure, présente d’emblée Julien Delacour. Un sondage posté sur les réseaux sociaux et quelques réponses positives plus tard, le projet commençait à prendre forme. Une petite dizaine d’élèves potentiels me suffisaient amplement. » Sur la carte de la péninsule, son choix s’arrête sur Telgruc-sur-Mer, village de deux-mille âmes facilement accessible. Sans tatamis ni dojo, le gymnase de l’école et son parquet feront l’affaire, une salle annexe en guise de vestiaire. « L’aspect matériel n’est pas primordial pour débuter, tranche le professeur. Si mes élèves prennent goût à la pratique en revanche, nous nous organiserons au fur et à mesure… » En filigrane, un message clair : fonder d’abord, perfectionner ensuite.

Crozon, année zéro

Sur la presqu’île en effet, l’atmosphère reste nature… et découverte. Ici, un premier professeur avait déjà tenté d’implanter le shotokan quelques années en arrière, sans succès. Résultat : les treize enfants qui s’entraînent le mercredi sont tous néophytes. Idem lors des deux séances réservées aux adultes, à l’exception d’une ancienne karatéka ayant précisé d’emblée vouloir réacquérir les bases. Alors la pédagogie prime, à la ville comme au gymnase. « Julien, c’est avant tout une approche très accessible et appliquée des arts martiaux. L’idée que le combat n’en constitue que la partie émergée de l’iceberg en quelque sorte », décrypte Caroline Lesage, séduite par les affiches placardées l’été dernier dans le centre du village. « L’objectif reste inchangé depuis le premier cours : que personne ne s’attende au cours que je vais mener en entrant dans la salle, pose le professeur qui insiste sur les notions d’équilibre, de maîtrise de son corps et de concentration. L’avantage, c’est qu’il y a encore tout à construire, de l’apprentissage technique à la connaissance culturelle, en passant par le kata et parfois même des aspects plus larges de posture ou de condition physique générale, égraine le professeur. Ce n’est pas plus mal cependant puisque le rôle d’instructeur principal reste également une première pour moi ! » Aucun risque d’amateurisme pour autant. Pratiquant depuis 2009, Julien Delacour assistait Maxence Delhaye au KC Marcheprime, en Gironde, depuis plusieurs années avant de fonder l’entité bretonne.

Un ingé’ dans la ville

Informé de sa mutation dix-huit mois avant de poser ses valises dans le Finistère, l’ingénieur-chercheur tient même à innover dans son enseignement. À commencer par un système récompensant l’investissement de sa jeune garde. Au début de chaque cours, les enfants présents reçoivent un autocollant d’assiduité. Indispensables, il faut en cumuler quinze, en plus de cinq badges « kata » et « technique », afin de pouvoir passer chacun de ses premiers grades. « Certains ont toujours plus de facilités que d’autres, mais ce sont parfois les moins assidus qui sont les plus doués. S’ils sont récompensés de cette manière, le reste du groupe peut trouver cela injuste, voire arrêter, explique-t-il. Or, le respect, lesprit de travail et de dépassement de soi sont des valeurs qui me sont chères. Je n’ai pas fondé ce club pour en tirer quelconque profit mais dans le but de partager… et chacun doit donner du sien pour que le groupe s’élève. »

Horizon 2027 et ensuite ?

Et le groupe adulte, qui s’étend de quatorze à soixante-quinze ans ? « En quelques mois, ils ont déjà pris conscience de leur corps, multiplient les questions et ne font plus rien aveuglément, se réjouit le professeur. Côté physique également, si cela reste encore perfectible, plusieurs éléments du groupe prennent l’initiative de travailler en dehors des créneaux ». Un tableau sans aucune ombre donc ? Une seule à tout dire, la probable mutation du professeur à l’horizon 2027 qui pourrait mettre le projet en péril à long terme. « C’est une échéance à double tranchant. Même si cela crée une certaine pression, il s’agit d’une motivation supplémentaire dans notre progression. Essayer de se mettre au niveau d’ici-là serait une manière de faire honneur à l’investissement de Julien et de sa femme Ève », avoue Caroline Lesage, qui n’exclue pas de l’assister sur certains cours d’ici une ou deux saisons. En attendant, elle continuera de contribuer aux nombreux projets menés par le néo-Crozonnais. « Nous envisageons déjà un stage commun entre le Mitsudomoe et le KC Marcheprime, lance Maxence Delhaye. Un partage d’expérience et de valeurs bénéfique à tout le monde qui permettrait de resserrer les liens ! » Et comme une idée en cache souvent cinq dans le cerveau de Julien Delacour, le professeur projette déjà d’emmener certains de ses élèves aux stages fédéraux, en plus de multiplier les manifestations et de mettre en place un stage caritatif au profit de Fight for Dignity.

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